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ALPHONSE DAUDET

épiés par une presse bavarde, lorsqu’on semble rechercher notre avis sur les sujets les plus éloignés de notre compétence ! »

Les acteurs (pensez à Delobelle) lui avaient été une mine précieuse de renseignements au point de vue de la vanité. « En ces miroirs grossissants l’on retrouve les effets de torse, de regard, d’attitude, habituels à tous les hommes, mais déformés, amplifiés par l’optique de la scène, l’éclairage d’en bas. » J’ajoute vite, pour ne pas froisser la plus susceptible des corporations, qu’Alphonse Daudet eut pour plusieurs comédiens la sympathie la plus affectueuse. Il faisait remarquer combien les méchants, les malhonnêtes, les fourbes sont rares dans ce milieu, comme l’on s’entraide : « Ces êtres là ont une existence factice. La réalité n’a presque pas de prise sur eux. Entre les répétitions et les représentations, où trouveraient-ils le temps de se ressaisir, de se retrouver semblable aux autres ? Un comédien, retombé dans la vie. m’avouait la douleur profonde de cette métamorphose, l’aveuglement de hibou en plein midi, l’envie qu’il portait aux camarades demeurés de l’autre côté de la rampe, côté mystérieux, enchanté, où l’on incarne l’illusion humaine. »

Pour certains comédiens il eut une affection véritable. Je citerai entre autres Coquelin, Porel et Lafontaine. Celui-ci l’émerveillait par sa vaste