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NORD ET MIDI

de ne mettre en œuvre que des caractères. C’est dans ces demi-teintes, dans ces passages de clair-obscur que notre tâche devient le plus difficile. « Un héros du non-héroïsme, » voilà le tour de force qu’a réalisé Flaubert dans l’Éducation sentimentale.

« Or un homme d’une race différente ou d’une époque différente devient, par cela même, typique. Dans une foule du midi, Roumestan ou Tartarin ne se distinguent pas. C’est Paris qui les met en lumière. De même nous fréquentons encore certains vieillards ou certaines personnes vivant hors du monde, qui ont conservé intacts les préjugés, les façons de voir, les générosités, les ardeurs de 48. Et c’est pour nous une joie, comme c’en est une pour le numismate, de découvrir une médaille bien nette. »

Il est, dans un roman de Jean Paul Richter, un personnage qui a passé son enfance sous terre et croit entrer dans le paradis le jour où, montant à la surface, il voit le ciel, les fleurs, les eaux et les forêts. Une pareille impression est réservée à quiconque, ayant vécu dans le nord, découvre brusquement le midi, la joie de la lumière. Cette joie, Alphonse Daudet l’avait conservée pieusement. Elle dominait en son âme la souffrance et la mélancolie.