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DE L’IMAGINATION

et hardie, vont sombrer dans l’officialité, et n’auront guère de continuateurs. Tu n’as pas tort de croire qu’entre la science et l’art les lignes de démarcation sont plus apparentes que réelles, et que là comme ici les progrès sont réalisés par des esprits indépendants, novateurs et briseurs de formules.

Mon père. — Certes, mais la science de la vie, dont nous parlions, pourra marcher à pas de géant, grâce à la multiplicité de ses points de vue.

On se partagera la besogne. Pour ce qui est de l’Imagination, ceux que passionnent les idées abstraites la considéreront sous cet aspect. Ils inaugureront ainsi cette philosophie de la sensibilité dont tu attends des merveilles et qui, en tous cas, nous sortira un peu des problèmes de la raison pure.

Ceux qui, comme moi, sont les zélés serviteurs du « concret », s’occuperont moins de l’Imagination en elle-même que des individus qui la manifestent. Les uns prendront les savants. Les autres étudieront les poètes. Des exemples, beaucoup d’exemples. C’est par les exemples qu’on dure. Vois Plutarque et Saint-Simon. Les amateurs de monstres étudieront les déformations de cette faculté sublime, les vicieux et les fous.

Moi. — As-tu grande confiance, quant à ce qui est des entreprises intellectuelles, dans les travaux