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DE L’IMAGINATION

nisme intérieur dont nous ne nous sommes pas encore occupés ?

Comme la plupart des phénomènes du dedans et du dehors, l’imagination procède par tourbillons. Chez ceux qui possèdent cette faculté au paroxysme, le moindre mobile extérieur, tombant dans le cerveau par les sens, suscite aussitôt une mise en mouvement de toutes les impressions sensorielles qu’avait recueillies la mémoire. Une vitre prise par le froid où se forment les élégants dessins de l’hiver m’a toujours paru une réduction de ce qui se passe alors dans l’esprit. Agissent là, dans le mystère des cellules nerveuses, une quantité de lois inconnues, d’attractions, de répulsions et de combinaisons diverses, aussi compliquées sans doute que celles qui régissent le mouvement des astres,

Mais il est aisé de distinguer une imagination rapide et une imagination lente. La première est d’observation perpétuelle. La seconde est d’un mécanisme à part. Des pensées, des embryons de pensée, des sensations, des souvenirs qui demeuraient engourdis dans les cryptes de notre substance sont tout à coup suscités par des impressions nouvelles. Il se forme alors, dans l’esprit, de lentes et tenaces figures, si tenaces que chez certains elles deviennent idées fixes. N’est-ce pas dans ces phénomènes d’imagination lente qu’il