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VIE ET LITTÉRATURE

raine musique ? Vérité et Poésie ; il n’est pourtant rien autre chose. Ces gens ont copié la nature : la nature dansait dans l’air bleu. Nulle discontinuité entre le monde extérieur et le monde intime, nulle saccade du désir, aucune désharmonie. Toutes fois qu’il y a rythme, il semble qu’il y ait perception heureuse.

— Et la douleur, père ?

— Elle ne désaccordait pas l’être. Il ne se révoltait contre elle. Elle ne servait pas le désordre. »

L’idée de ces frises devenues violentes, filles du Nord et Valkyries, l’amena au cerveau de Wagner où luttaient deux sens de la beauté, l’un, en quelque façon statique, immuable, aux ondes très lentes, proche de l’idéal grec, l’autre, furieux, excessif, la bouillonnante source saxonne.

C’est une paresse de l’imagination de classer les intellectuels en analystes et synthétiques, d’après les œuvres ou les paroles. Alphonse Daudet cherchait les causes et triomphait dans le détail, mais son instinct l’avertissait là où fragmenter eût été dissoudre. Si l’œuvre s’offrait complète, il l’admirait en masse ; ami des proportions et de la mesure (ne quid nimiste, s’intitulait-il), il n’eut rien du miniaturiste. Il voyait large ; il ne ratiocinait ni ne discutait son plaisir. Il avait le respect de toute émotion. Les querelles de