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LE LANGAGE ET L’HÉRÉDITÉ.

Deux qualités sont à envisager, dans la phrase ou dans la période : sa correction et son mouvement. Jules Lemaître, connaisseur s’il en fut, définissait ainsi la phrase française : « Un sujet, un verbe, un attribut. » C’est le mérite du Candide de Voltaire, ouvrage d’une rare importance psychique, de répondre à cette définition. Or, Voltaire était un hérédo de choix, mais l’impulsion créatrice était chez lui d’une qualité telle qu’elle arrivait de temps en temps, et presque périodiquement, à le débarrasser de toutes ses scories congénitales et à ramener ainsi le calme dans sa nature agitée et troublée. Candide est une de ces expulsions en masse, une eau résiduaire des hérédismes voltairiens, canalisée dans une sorte de sagesse encore grimaçante. Combien de fois n’ai-je pas lu et relu ce petit ouvrage énigmatique, où l’anarchie prend un air d’ordonnance, afin de saisir son ultime secret ! Il semble le manuel du désespoir et du dégoût de tout et cependant il y a au fond de lui comme une espérance. Charles Maurras explique cette contradiction en disant qu’il signifie quelque chose comme : « La voie est libre ». Quoi qu’il en soit, Candide est le