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LA VIE ORAGEUSE DE CLEMENCEAU

tion en petit. Sans elle nous n’aurions pas eu la République. N’est-ce pas, Lockroy ?

Sa voix mâchait les mots.

— Mais comment donc, mon cher ami. Vous avez eu de la chance de vous en tirer… dit ironiquement le gendre de Victor Hugo…

Il ajouta :

— Vous aussi, Rochefort, avez eu de la chance. Thiers ne demandait qu’à vous faire fusiller, il vous rendait responsable de l’incendie de sa bicoque, place Saint-Georges.

— Mais comment donc C’était une canaille, une sale petite canaille et rien de plus.

Gustave Geffroy eut un rire concentré et murmura :

C’est Adoiphe Thiers qu’on me nomme,
Sacré nom d’un petit bonhomme.

— Tout ça est passé, dit Gouzien, « comme l’ombre et comme le vent ». Il se leva, courut vers le salon, s’assit au piano et, d’une voix vigoureuse, entama le refrain :

Chez les Ménard
Les invités sont des veinards…
Ran plan plan, plan plan
Ran pata plan.

On sortit de table. Il était deux heures du matin. La giboulée, assurait-on, avait cessé, Challemel-Lacour fit signe à Clemenceau et à Lockroy et ils se réunirent dans un coin du petit salon pour parler de la situation politique, assez embrouillée depuis la mort de Gambetta et de la confusion des partis.