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LA VIE ORAGEUSE DE CLEMENCEAU

On sait la suite et comment le génie militaire du nouveau maréchal sut marteler sans répit les positions ennemies, qui se décollaient les unes après les autres. Cela jusqu’au moment où la retraite, protégée par les sous-officiers allemands commandant des nids de mitrailleuses, fut sur le point de dégénérer en débâcle.

On a rapporté, vers cette époque, l’allocution de Clemenceau à Pétain et à quelques autres :

Je n’ai pas l’habitude, dit-il, de donner des conseils relatifs aux opérations militaires ; mais, comme chef du gouvernement, je me permets une simple recommandation. Le pays sent la victoire : je vous demande de n’avancer maintenant qu’avec la certitude de n’être pas obligé ensuite de revenir en arrière. L’opinion publique vous en saura un gré infini. D’ailleurs, ajouta-t-il en commençant de relever malicieusement la tête, nous n’avons plus à craindre de pareilles éventualités depuis la réussite de l’opération de Gouraud.

Il faisait allusion à la manœuvre de la 4e armée abandonnant, dès le 15 juillet au matin, ses positions avancées pour se replier sur sa position principale, tactique qui favorisa la formidable contre-attaque de l’armée Mangin, le 18 du même mois. Un silence absolu de plusieurs longues secondes. Alors Clemenceau, relevant la tête, regarde dans les yeux Pétain, qui n’avait pas bronché, et ajoute :

D’ailleurs, général Pétain, le général Gouraud se plaît à dire que cette opération c’est la vôtre.