Aller au contenu

Page:Léon Daudet – La vie orageuse de Clemenceau.djvu/293

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
292
LA VIE ORAGEUSE DE CLEMENCEAU

tirent à la chute qu’il fit, pendant un arrêt, en passant par la fenêtre de son wagon particulier. Il était en train de se déshabiller et en caleçon. Un contrôleur de la voie s’approcha : « Je suis le président de la République », dit Deschanel, à quoi le contrôleur, croyant à une plaisanterie : « Et moi, je suis le pape. » Quand Clemenceau apprit le fait, il dit simplement : « Ah, le pauvre bougre ! »

Deschanel une fois déposé, je dus de nouveau aller à Versailles pour l’élection de Millerand. Je votai, comme la première fois, pour Foch, lequel d’ailleurs n’était pas candidat. Rien de plus ridicule, de plus morne que ces cérémonies si vaines.

Clemenceau une fois dans la retraite, et après un voyage aux Indes en compagnie de son fidèle et admirable ami M. Nicolas Pietri (par la suite son exécuteur testamentaire), se mit d’arrache-pied à son grand ouvrage Au Soir de la Pensée, qui devait résumer la somme de ses connaissances et de ses méditations. C’est, condensé en deux gros volumes de 450 à 500 pages chacun, le credo scientifique d’un incroyant et une tentative de synthèse fondée sur un mélange, assez dru, d’évolutionnisme et de positivisme. Comme il eut, en 1917, la poussée active d’une jeunesse nouvelle, le Vieux eut, à la fin de la guerre et après l’euphorie de la victoire, une poussée intellectuelle pareille à celle que Renan appelait, pour les jeunes adultes, « l’encéphalite ». Nous avons vu combien ses traditions familiales lui tenaient au cœur. Il en fut de même de ses traditions scientifiques et de l’enseignement histologique de Charles Robin. Il appartenait à la génération universitaire à laquelle le microscope semblait ouvrir un champ immense en Anatomie normale, comme en anatomie pathologique. L’exaltation