Page:Léon Daudet – Le stupide XIXe siècle.djvu/17

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
11
AVANT-PROPOS EN MANIÈRE D’iNTRODUCTION.

N’allez pas en conclure, au moins, que je préconise la violence (posthume ou non), vis-à-vis des penseurs ou écrivains pernicieux, qui ouvrirent et peuplèrent les charniers du premier Empire, de la Commune, des deux guerres franco-allemandes de 1870 et de 1914. Je préconise plus simplement l’examen critique, ferme et dru, puis le déboulonnage des idoles de la révolution et de la démocratie au XIXe siècle. Mais pour que cette indispensable opération ait lieu, il faut d’abord que les gens aient remarqué le lien de ces idoles (lien de cause à effet), aux maux qu’ils engendrèrent. C’est un premier point, et sans doute le plus malaisé à obtenir.

En effet, le sens de la responsabilité personnelle s’est fortement déprimé au XIXe siècle, alors que tout le long du moyen âge, et encore au XVIe siècle et au XVIIe siècle, il était si vigoureux. Le fatalisme et le déterminisme en sont le témoignage, qui font croire aux hommes, et notamment à nos compatriotes, que les maux subis et soufferts, dans le domaine des choses d’État notamment, tiennent, non à de mauvaises institutions et à une mauvaise politique, non au mûrissement des erreurs et lâchetés, mais à des nécessités lointaines et inéluctables, comme la rotation de la terre, ou la succession des saisons. L’affaissement de l’esprit déductif est une caractéristique du XIXe siècle, en même temps que sa timidité psychologique. Les écrivains prétendus sceptiques (un Renan, par exemple), n’osent pas aller jusqu’au bout de leur raisonnement, ni même d’un raisonnement quelconque, de peur d’y ren-