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LE STUPIDE XIXe SIÈCLE.

ont ainsi fait leur chemin tragique ; les immolations qui en sont résultées dépassent tous les sacrifices de Moloch et de Baal. J’écris ce livre avec la confiance qu’en dépit de ses imperfections, son alarme incitera des hommes jeunes, ardents, sains et cultivés, ayant le sens de la patrie, et l’usage, avec l’amour, de sa forte langue, à lutter, comme nous le faisons à l’Action française, contre ces erreurs maîtresses de massacres. Mourir avec les yeux ouverts sur la raison pour laquelle on meurt est un avant-goût de l’immortalité. La mort, en ilote, les yeux fermés sur les causes, sur les Mères de Gœthe et la genèse de sa mort, est un tombeau double et piteux. Je n’écris pas seulement pour les victimes, virtuelles ou présentes, de ces erreurs, mais aussi pour leurs pères et mères. Les pères, mes contemporains, ont besoin d’être désengourdis et instruits. Ils ont trop cru à la stabilité du mal, à son non-parachèvement par le pire. Les mères, ayant davantage gardé l’habitude de l’oraison (qui est la toilette quotidienne de l’esprit), ont peut-être plus de clairvoyance. Mais elles craignent, en allant jusqu’au bout de cette clairvoyance, de se mêler de ce qui ne les regarde pas. Or, la sauvegarde de leurs enfants les regarde ; et celle-ci serait définitivement compromise, si la prolongation des idoles amenait demain un nouveau massacre.

Car les révolutions et les guerres, et en général les maux humains, découlent naturellement des erreurs des hommes. Erreurs des esprits, erreurs des tissus, erreurs héréditaires, erreurs des grou-