Page:Léon Frapié - La maternelle, 1904.djvu/327

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Demain est le dernier jour de classe : il faudrait que cette journée fût bien mauvaise pour que je faillisse à mon devoir qui est de rester au service des enfants !

Oh ! rien n’a été omis. Et Mme Paulin a suivi fanatiquement les instructions reçues. On a fait combattre par avance mes scrupules si graves, mes scrupules de conscience : « Les gens du peuple ne tiennent pas à vous ; ils ne comprennent pas votre sacrifice. Vous les servirez mieux de loin que de près. Il ne faut pas descendre au niveau des humbles, il faut les élever à soi, etc. »

Vraiment ? Eh bien ! si, demain, les parents, les enfants me renient, nous verrons…

Mais j’espère bien être empêchée de me rendre chez mon oncle, après-demain. Si j’y vais, c’en est fait !… Je le sens à ma faiblesse physique, à ma volonté qui s’égare, à ma mémoire obscurcie… quelle honte ! je le sens au trouble qui m’envahit… le trouble de mes premières fiançailles ! La créature humaine subit des lois bien ironiques : j’ai beau me répéter qu’une fois déjà j’ai été déçue, bafouée, tant pis ! l’aspiration renaît !

Ce sont « les gens d’ici » qui décideront. Demain, j’aurai une attitude qui criera vers tous : « Ne me laissez pas partir ! » Et nous verrons !

Je veux passer cette nuit à écrire, à penser, je veillerai « en compagnie des enfants de l’école » à qui je me confesserai d’avance, en cas de défaillance.

Et, quelle que soit la journée de demain, j’aurai