gage sur ce fauteuil ; pour se remettre, on peut faire du cheval sur la chaise.
Le soir, au sortir de l’école, je prends, au vins-restaurant qui est en bas de chez moi, du bouillon dans une boîte à lait et une portion dans une assiette. Il faut que je traverse la salle où s’alimentent des hommes et des femmes d’aspect étrange ; des boulettes de pain me cinglent la figure et des mots d’argot moqueurs courent après mes jupons. Je monte vite. Ma chambre cellulaire, au papier ridé, ne me ragaillardit pas ; mon dîner n’est pas bon.
Mais je ne veux pas me sentir abandonnée ; je ne veux pas m’ennuyer. Vite, je me débarrasse de la corvée de manger, puis je remue mes livres, je pose du papier sur ma table : la solitude et le silence font sortir de moi toute l’animation recueillie dans la journée, j’écris.
Mon premier dimanche, je le passai dans mon lit. J’étais à bout de forces, au point de me résigner au jeûne complet : descendre et remonter mes six étages pour aller chercher du pain et du lait ? jamais, j’aurais mieux aimé mourir là.
Dans l’après-midi, des coups frappés sur le palier secouèrent mon demi-sommeil.
Ma porte ouverte, la concierge apparut qui plongea les yeux dans mon réduit :
— Je ne vous avais pas vue de la matinée, j’étais inquiète ; c’est une chambre qui n’a pas de chance.
Elle dit, sinistrement, et me laissa la distraction