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la maternelle

Il est risible et touchant de voir le sursaut du « signal » chez des élèves de deux ans. Ces innocents qui sont l’instabilité et le bruit perpétuels, on les fait s’immobiliser, se taire pendant des quarts d’heure ! ces bébés qui devraient être l’insouciance, la libre impulsion même, on les fait obéir strictement au sifflet !

Je mets en principe que les enfants ne sont, par nature, ni très méchants, ni très audacieux ; et, à part quelques inconscients, ils sont très facilement intimidables.

Mais, grands dieux ! n’aurais-je pas un faible pour les indisciplinés ? pour les malintentionnés !! Je préfère ne pas approfondir et raconter un incident gentil.

Dans un petit espace, entre le mur et le tuyau du vaste poêle du préau, je cache un torchon qu’il m’est très utile de trouver sous la main, pour accourir, en armes, à toute réquisition. Dès le début j’avais adopté cet endroit et, chaque jour, trois, quatre fois, mon torchon était tiré de là et jeté par terre, à mon grand agacement, car la directrice me répète souvent avec sa haute autorité :

— Surtout, Rose, de l’ordre ; ne laissez pas traîner vos ustensiles !

Aujourd’hui, vers une heure, avant la conduite aux cabinets, comme la marmaille grouillait dans le préau, j’ai surpris une gamine, qui, sournoisement, l’œil sur moi, fouillait dans ma cachette. C’était la coupable ! Je n’avais jamais fait attention à elle, je ne l’aurais pas reconnue dans la rue pour