mousse, change le navire en léger poisson, tandis que nous franchirons les bouillonnements orageux, les vagues escarpées !
« Ô vierge, qui habites le voisinage des cataractes, des tourbillons déchaînés[1], tresse avec des étoupes nébuleuses un câble nébuleux[2], et tends-le sur les eaux de la cataracte, afin qu’il serve de guide au navire goudronné, afin qu’avec son aide un homme de moyenne taille, un homme même tout à fait ignorant des lieux, puisse trouver la véritable route et marcher en avant !
« Ô Melatar[3], douce femme, prends ton précieux gouvernail et conduis le navire à travers les brisants maudits, devant l’habitation du jaloux, les fenêtres du sorcier[4] !
« Et si tous ces moyens se trouvent encore insuffisants, ô Ukko, dieu suprême, conduis toi-même le navire avec ton glaive, fraye-lui sa route avec ta lame étincelante, afin qu’il franchisse librement les vagues furieuses, qu’il sorte sain et sauf de la cataracte ! »
Et le vieux Wäinämöinen reprit avec vigueur le gouvernail, et il poussa le navire à travers les écueils, les bouillonnements effroyables ; il lui fit surmonter heureusement tous les obstacles.
Mais, quand il eut atteint la pleine eau, le navire s’arrêta tout à coup, et demeura immobile.
Le forgeron Ilmarinen, le joyeux Lemminkäinen piquèrent dans les flots la pointe d’une rame, d’une gaffe
- ↑ Kosken neiti : vierge ou déesse des cataractes.
- ↑ C’est-à-dire marque la route à travers la cataracte avec un cordon de nuages ou de vapeurs. Les cataractes sont très-nombreuses en Finlande, et ceux qui tentent de les descendre en bateau s’exposent aux plus grands dangers. Il est vrai que les paysans finnois sont très-intrépides, et qu’ils se tirent presque toujours avec honneur de cette aventure.
- ↑ Divinité qui règne sur le gouvernail ainsi que sur les rames, et protége les pilotes et les rameurs.
- ↑ Les cataractes, à cause des dangers qu’elles présentaient étaient regardées comme ensorcelées.