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Page:Lévi - L’Inde civilisatrice, 1938.djvu/169

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plupart des rois du moyen-âge indien, il compose en son honneur un poème en singhalais, la Tradition de la Sainte Dent (Daladāvaṃsa), souvent remanié et rajeuni aux époques suivantes.

L’envoi d’une ambassade à Samudragupta par le roi de Ceylan montre quelle importance politique s’attachait à la possession des Lieux Saints. Chaque secte, chaque nation aspirait à y disposer d’un couvent, une sorte d’hôtel pour y recevoir ses moines ou ses pélerins de passage. Les fêtes qui s’y succédaient fréquemment étaient autant de foires qui attiraient la multitude ambulante des trafiquants et des touristes qui de temps immémorial foule constamment les sentiers de l’Inde, toujours disposée à tirer parti des occasions les plus respectables ou les plus frivoles pour battre les chemins même les plus lointains. Le tableau tracé par Kipling au début de Kim est exact pour l’Inde de tous les temps. Le roi qui disposait des Lieux Saints disposait par là d’une puissance considérable d’ordre politique et d’ordre économique. Aussi la concurrence sévissait jusque dans ce domaine ; un immense réseau de lieux saints s’improvisait avec les progrès de l’Église ; souverain et religieux s’entendaient à merveille pour découvrir et sanctifier les traces du Maître dans les contrées dont il n’avait connu ni le nom ni l’existence. Du Magadha à Mathurā, de Mathurā au Penjab, au Cachemire, à l’Afghanistan, jusqu’à la Perse, jusqu’au centre de l’Asie, des sanctuaires fréquentés rappelaient les voyages du Bouddha et ses manifestations miraculeuses. On avait découvert la trace de son pied sur un sommet de Ceylan où il était venu pour instruire le démon Rāvaṇa. À la longue, avec le déclin de