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Page:Lévi - L’Inde civilisatrice, 1938.djvu/209

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en 568, pour solliciter le passage des marchandises par la Perse : Chosroès achète la soie qu’on lui offre, et la livre aux flammes. Le long de l’Océan Indien par la voie du commerce maritime, la concurrence est aussi ardente. Justinien, qui a soumis la côte arabique de la mer Rouge, essaie de gagner le Yémen (Homérites) et l’Éthiopie « pour qu’ils aillent acheter la soie dans l’Inde et viennent la vendre aux Romains » ; les voyages de Cosmas entraient bien dans ce programme. Mais Chosroès s’empresse d’intervenir sous prétexte de défendre le Yémen contre les Éthiopiens qui l’avaient envahi pour punir un Juif, qui commandait à Aden, d’avoir maltraité un Chrétien. À Ceylan, au contraire, il est le protecteur des Chrétiens qui sont là d’origine perse avec un clergé perse.

Esprit ouvert et sans fanatisme, Chosroès a offert une libre hospitalité aux victimes des fureurs religieuses de Byzance. Il a recueilli les Nestoriens que l’empereur Zénon avait expulsé en 489 de tout l’empire byzantin ; l’apostolat nestorien qui va s’exercer dans le sud de l’Inde, et dans les ports côtiers, à Ceylan, chez les Turcs, en Asie Centrale, jusqu’en Chine, devient un instrument de propagande et d’action au service des intérêts de la Perse. Quand l’Académie d’Athènes voit l’Empire grec fermer ses portes en 529, Chosroès appelle en Perse les philosophes et les savants proscrits ; la science et la sagesse grecques passent en traduction dans les langues de la Perse, en pehlevi, en syriaque ; c’est là que les Arabes vont les retrouver pour les rapporter à l’Occident chrétien qui les aura oubliées. Et dans ce mouvement d’échanges qui élargit à nouveau le monde, l’Inde n’apporte pas seulement les produits de son sol ou de ses fabriques. Elle donne à Chosroès la moëlle de sa sagesse