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Page:Lévi - L’Inde civilisatrice, 1938.djvu/216

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retraite. Mais le dénouement n’en est pas moins tragique. Le roi du Bengale, Çaçāṇka, qui a vaincu et chassé son voisin du Magadha, et qui a osé porter une main sacrilège sur l’arbre millénaire qui avait abrité sous son feuillage la Vision Libératrice du Bouddha, a surpris la bonne foi de Rājyavardhana, l’a attiré dans un piège, sous prétexte d’un entretien intime, et l’a assassiné.

Les ministres et les grands pressent Harṣa d’assumer le pouvoir souverain. Harṣa ne s’y résigne qu’à contrecœur. Il tient à consulter d’abord le plus populaire des Bodhisattvas, Avalokiteçvara ; le dieu lui apparaît en songe et l’engage à déférer aux désirs de ses sujets ; toutefois, il doit s’abstenir de monter sur le « siège aux lions », le trône, et de prendre le titre royal. En fait, Harṣa n’accepta d’abord que le titre de kumāra-rāja « prince-roi », comme s’il laissait à son père et à son frère défunts l’honneur de porter la couronne. Il choisit comme surnom l’appellation de Çīlāditya « Soleil de moralité », pour affirmer son attachement à la vertu de préférence aux vertus guerrières qu’exaltait le nom classique de Vikramāditya « Soleil d’héroïsme ».

Sur le point de partir en campagne contre le meurtrier de son frère, Harṣa est informé d’une nouvelle péripétie : dans la confusion qui a suivi la mort de Rājyavardhana, Kanyakubja (Canoge) où sa sœur était captive a été occupée par un Gupta ; Rājyaçrī a pu s’échapper de prison, elle s’est enfuie vers le sud, dans les retraites sauvages des monts Vindhya, où on l’a perdue de vue. Harṣa est en présence d’un conflit cornélien : doit-il sacrifier le salut de sa sœur à l’honneur politique qui lui commande de laver l’injure subie par sa dynastie et de châtier le