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Page:Lévi - L’Inde civilisatrice, 1938.djvu/229

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ment de ce genre quand elle s’était vue menacée dans ses doctrines, dans ses institutions, dans le plus intime et le plus profond de son existence par des invasions d’autres races, étrangères à son passé, réfractaires à son idéal. Mais avec Harṣa et Pulikeçin, l’Inde est maîtresse chez elle. Tandis que Mahomet forge dans un coin de l’Arabie (Hégire, 622) l’outil de sa ruine prochaine, elle peut s’abandonner à l’illusion de la stabilité, se laisser aller doucement aux rêves gracieux qui l’enchantent. Dans la pléiade des auteurs qui font la gloire durable de son règne, Harṣa lui-même figure au premier rang, et les œuvres qui portent son nom sont peut-être les plus expressives de l’époque. Une tradition unanime lui attribue trois chefs d’œuvre du théâtre indien : Ratnāvalī, Priyadarçikā, Nāgānanda. Le prologue de chacune d’elles contient en effet un vers identique qui désigne Harṣa comme leur auteur : « Çri Harṣa est un poète habile ; cette assemblée est composée de connaisseurs ; le sujet est intéressant ; nous sommes de bons comédiens. Autant de raisons qui chacune à part assurent le succès, et notre chance les réunit toutes ! »

Ratnāvalī et Priyadarçikā sont deux nātikā, comédies galantes bâties sur une intrigue de harem. Harṣa s’est contenté de transporter à la scène deux des innombrables aventures amoureuses que la légende avait groupées autour d’un ancien roi de Kauçāmbī, Udayana, et qui avait servi de cadre à l’Iliade des contes indiens, la Bṛhatkathā. L’intrigue, les personnages, tout y est bâti sur un type convenu, sagement fixé par les Boileau de l’art dramatique indien ; en récompense, Ratnāvalī est une des œuvres le plus fréquemment citées chez les auteurs de rhétoriques et