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Page:Lévi - L’Inde civilisatrice, 1938.djvu/54

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sujets (« Ainsi parle Darius, fils d’Hystaspe ») pour leur raconter, par des inscriptions gravées sur la roche, ses campagnes, ses victoires, ses vengeances ; il consolidait du même coup son pouvoir et sa gloire. Açoka, élevé sous l’influence iranienne dans un palais inspiré des Achéménides, emprunte à Darius son procédé, jusqu’à son formulaire, pour publier ce qu’il appelle « la victoire de la loi ». Pour se faire mieux entendre, il dédaigne la langue savante, le sanscrit, réservé aux écoles brahmaniques, il s’adapte au parler de chaque région ; en Gandhāra, il se rapproche du dialecte gandharien, comme il se rapproche en Kalinga du dialecte kalinga. L’Inde a deux systèmes d’écritures, l’un issu de l’alphabet araméen, est en usage dans les anciennes satrapies de Darius ; l’autre, aussi d’origine sémitique, mais transformé jusqu’au point d’avoir, comme le grec et le latin, pris la direction de gauche à droite. Açoka, selon les lieux, emploie l’une ou l’autre écriture. L’épigraphie indienne s’ouvre avec ces monuments vénérables qui brusquement illuminent l’histoire, la religion, la linguistique. Açoka, avec une sorte de familiarité paternelle, tient ses sujets au courant de ses progrès personnels, de ses réformes, de ses institutions : « On tuait jadis pour la cuisine royale des milliers d’animaux par jour ; à présent, au moment où cette proclamation est écrite, on n’en tue plus que trois par jour : deux paons et une antilope. Désormais on n’en tuera plus du tout » (Édit I). C’est avec la même simplicité qu’il annonce la distribution de remèdes dans tout l’empire, et jusque dans la Syrie grecque, ou la création de fonctionnaires chargés de veiller à l’Ordre légal, ou de rapporter directement au souverain les affaires d’or-