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Page:Lévi - L’Inde civilisatrice, 1938.djvu/76

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a donné à l’Inde, et que l’Inde a donné au monde. Sans le témoignage exprès du pilier de Besnagar, qui donc aurait osé supposer à Kṛṣṇa un adorateur grec, à ce Kṛṣṇa qui naît dans une étable, et que la fuite opportune de ses parents dérobe au massacre des Innocents ordonné par le tyran Kamsa ? Et que d’autres voix, muettes encore, attendent parmi les ruines l’heure de porter aussi leur témoignage !

L’imagination est libre de rêver aux fruits qu’aurait pu porter la fusion entre l’Occident et l’Orient, si elle s’était accomplie sous les auspices de la Grèce et de l’Inde, au lieu de se réaliser deux siècles plus tard sous les auspices de l’Empire romain et de la Judée. La propagation triomphante du bouddhisme indien au centre, à l’est, au sud de l’Asie dans les premiers siècles de l’ère chrétienne montre quelles puissances d’expansion recélait dès ce moment le fond bouillonnant du génie de l’Inde ; Açoka les avait pressenties ; il avait tenté d’en régler ou d’en contrôler officiellement l’emploi. L’histoire qui cherche à tâtons dans l’obscurité de ce passé captivant, entrevoit des lueurs éparses et fugaces qu’elle n’ose pas poursuivre, mais qu’elle ne peut pourtant pas ignorer. Le problème des emprunts ou des influences dans l’ordre de l’esprit est toujours des plus embarrassant ; dans l’Inde, où l’histoire est encore toute à faire, on appréhende de l’aborder. Il existe néanmoins. Je n’ai pas à revenir ici sur la statuaire. Les admirables travaux de mon collègue M. Foucher ont rendu familier au public éclairé l’art indo-grec ; les visiteurs de nos musées et de nos expositions ont vu ces nobles images, aux draperies régulières, où le modelé, les proportions, le style,