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Page:Lévi - L’Inde civilisatrice, 1938.djvu/77

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la façon proclament, pour ainsi dire, leur provenance hellénique ou hellénistique, mais qui se révèlent exotiques par la singularité de l’attitude, du geste, de la coiffure, de l’ornement et surtout par la nouveauté de l’expression ; une indication délicate au joint des lèvres, au pli des paupières donne au visage une sorte d’irradiation intérieure, de placidité grave et souriante, ou semble se jouer l’énigme de l’univers. Sans doute, quand il s’agissait de sculpter dans un chapiteau des feuilles d’acanthe, de dérouler au long d’une frise des guirlandes fleuries, ou même d’illustrer en scènes figurées les pieuses légendes et les contes édifiants, l’ouvrier n’avait qu’à mettre en œuvre sa technique d’école ; mais les élèves des ateliers grecs qui ont donné aux trois quarts de l’Asie le type définitif de leurs dieux ne se contentaient pas de mettre leur ciseau au service de leur clientèle barbare. L’intelligence seule n’aurait pas suffi à cette création ; il y a fallu l’émotion d’une sensibilité parente tout au moins de la foi.

En dehors de la statuaire, d’autres techniques d’ordre concret manifesteront encore, avec le progrès des recherches, l’influence de la civilisation grecque. Le Grec est, pour le conte indien, en particulier pour le conte bouddhique, le type d’une adresse un peu diabolique. Le peintre grec est surtout un artiste en trompe-l’œil ; l’histoire des oiseaux qui viennent becqueter les raisins de Zeuxis n’est que l’amorce innocente des malices imputées aux peintres grecs : hommage spontané rendu à l’exactitude et à la justesse du goût grec par un peuple trop ardent d’imagination pour s’en tenir à la nature. Le Grec est un ingénieur, un constructeur, un mécanicien qui réalise tous les prodiges. Le phi-