Page:Lévy-Bruhl - L’Allemagne depuis Leibniz, 1907.djvu/30

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

homme de bien est le bonheur de sa patrie. » Vains discours, avis inutiles. Tous ces princes allemands et leurs conseillers, à qui Leibniz s’adressait, auraient encore plutôt compris sa métaphysique que son patriotisme.

II

Leibniz était trop philosophe pour ne pas aller au fond des choses. Si l’Empire soutirait ainsi de guerres malheureuses, et surtout des traités désastreux qui terminaient ou plutôt qui suspendaient ces guerres, la faute en était évidemment au mauvais état intérieur de l’Allemagne. De la quantité de projets élaborés par Leibniz, et touchant aux questions les plus diverses : politiques, religieuses, économiques, et par-dessus tout, morales.

Au point de vue politique proprement dit[1], Leibniz n’ignore pas les vices de la constitution actuelle de l’Empire. Il déplore le morcellement presque infini de la souveraineté, l’égoïsme des petits princes, leur vénalité et leur mendicité ; il comprend que dans ces conditions une action rapide et énergique devient presque impossible. Mais il espère toujours ramener les princes à de meilleurs sentiments, et alors les inconvénients seraient fort atténués par un entier dévouement à la patrie commune[2]. D’autre part, il y a avantage à conser-

  1. Klopp, I, p.11, Bedenken welchergestalt, etc.
  2. V. une lettre inédite de Leibniz à Wassenaer, citée par Bodemann, Der Briefwechsel des G. W. Leibniz. Hannover 1889, p. 889