j’avais bien aimé le Chevalier, aurais-je
conſenti à ſon départ, & à être l’épouſe
du Comte de ... Ma mere a abuſé
de ma faibleſſe, de ſon autorité ;…
cruelle obéiſſance !… Mes idées ſont
totalement bouleverſées. Je ne ſuis plus
à moi, je ne ſais ce que je veux. Suſpendue
entre deux mouvemens contraires,
je me ſens à la fois capable de
tout & de rien. Je forme mille projets
que je renverſe à l’inſtant ; ma ſituation
eſt auſſi triſte que déſeſpérante. Ô
Dieu !… ô amour !… ô Lucie !…
Il n’eſt que trop vrai, ma chere amie, que la pauvre d’Herbeville n’eſt plus, & qu’elle s’eſt empoiſonnée volontairement pour n’être pas obligée de coucher avec un homme qu’elle n’aimait pas. Elle eſt rendue la victime de l’obéiſſance & de la ſotte vanité de ſa mere. Voici comme la choſe s’eſt paſſée.
Au moment où on la conduiſit dans la chambre nuptiale, & que chacun la