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Page:L’Étourdi, 1784.djvu/36

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L’ÉTOURDI.


dans un ſi vif mouvement de plaiſir & d’impatience, qu’elle tentait de franchir les barrieres que le corps lui oppoſe, pour voler ſur les levres de ma chere Comteſſe, s’y pénétrer de la plus douce volupté : mais ne trouvant aucune iſſue, elle ſe répandait dans toute ſa priſon, & accablée de ſes efforts, elle ſe trouvait anéantie.

Je n’aurais certainement pas pu réſiſter au feu qui me dévorait, ſi le tendre amour qui veille au bonheur des amans n’eût pris pitié de moi, en me ſuggérant l’un des plus ſinguliers expédiens dont on ſe ſoit jamais ſervi.

Le premier jour d’Avril eſt conſacré par l’uſage à s’amuſer aux dépends d’autrui, en cherchant à lui donner quelque leurre. Ce fut à cet uſage auquel j’eus recours ; il me tira de l’état de langueur dans lequel je dépériſſais, en me fourniſſant l’occaſion de faire connaiſſance avec l’objet que j’idolâtrais en ſecret, & auquel je n’avais jamais pu parvenir de me faire préſenter ; ma ſociété étant totalement étrangere à la ſienne.