Page:L’Arioste - Roland furieux, trad. Reynard, 1880, volume 2.djvu/135

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.


CHANT XIX


Argument. — Cloridan et Médor, surpris par les ennemis dans leur pieux office, sont, l’un tué, l’autre blessé mortellement. Survient Angélique ; elle prend soin de Médor, le guérit et en devient amoureuse. — Marphise et ses compagnons font naufrage dans le golfe de Laias, près d’une ville gouvernée par les femmes ; là ils apprennent une étrange coutume établie par ce gouvernement féminin. Marphise tue neuf guerriers et lutte jusqu’au soir contre le dixième.



Aucun mortel ne peut savoir de qui il est véritablement aimé, tant qu’il occupe le haut de la roue de la Fortune ; car les vrais et les faux amis se tiennent à ses côtés, lui témoignant tous une même fidélité. Mais son heureux destin vient-il à se changer en adversité, la tourbe des adulateurs lève le pied, et celui-là seul qui aime de cœur, reste plus dévoué que jamais, et chérit son maître même après la mort.

Si, comme le visage, le cœur se montrait à découvert, tel qui est en faveur à la cour et opprime les autres, et tel qui est en disgrâce auprès de son prince, changeraient mutuellement de fortune. Celui qui est humble deviendrait soudain le plus grand, et le grand tomberait au rang des plus infimes. Mais revenons à Médor, si fidèle et si attaché à son maître avant et après la mort de ce dernier.

L’infortuné jouvenceau cherche à se réfugier