Page:L’Arioste - Roland furieux, trad. Reynard, 1880, volume 2.djvu/143

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nouvelle, que vous ait jamais accordée, en retour de votre dévouement, celle pour qui vous avez tant souffert.

Oh ! si tu pouvais jamais revenir à la vie, combien ta peine serait cruelle, ô roi Agrican, toi envers qui elle se montra si dédaigneuse, et qu’elle repoussa d’une façon si dure et si inhumaine ! Et toi, Ferragus, et vous, au nombre de plus de mille, dont je passe les noms, qui avez accumulé tant de prouesses pour cette ingrate, combien il vous serait douloureux de la voir maintenant aux bras de celui-ci !

Angélique laissa cueillir à Médor la première rose, non encore effleurée, du beau jardin où personne n’avait été assez heureux pour mettre les pieds. Afin de légitimer sa faiblesse, on célébra les saintes cérémonies du mariage, sous les auspices de l’amour, et avec la femme du berger pour marraine.

Sous cet humble toit, les noces furent faites aussi solennellement que possible, et pendant plus d’un mois les deux amants goûtèrent en paix de tranquilles plaisirs. La dame ne voyait rien au-dessus du jouvenceau, et ne pouvait s’en rassasier. Bien qu’elle fût toujours pendue à son cou, elle ne sentait jamais ses désirs entièrement satisfaits.

Soit qu’elle restât enfermée ou qu’elle sortît de la cabane, elle avait jour et nuit le beau jouvenceau à son côté. Matin et soir elle parcourait l’une et l’autre rive, foulant aux pieds les vertes prairies. Dans le milieu du jour, tous deux se mettaient à l’abri sous une grotte non moins com-