Page:L’Arioste - Roland furieux, trad. Reynard, 1880, volume 2.djvu/190

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meilleure route, hors de ce marécage. Au bout du sentier, elles virent un chevalier qui venait.à leur rencontre.

Le chevalier, monté sur un destrier richement caparaçonné, couvert d’armes brillantes et de vêtements brodés, s’en venait vers le ruisseau, accompagné d’une damoiselle et d’un seul écuyer. La damoiselle qu’il avait avec lui était fort belle, mais son air était hautain et peu gracieux. Elle semblait remplie d’orgueil et de morgue, et tout à fait digne du chevalier qui l’escortait.

Ce chevalier était Pinabel, l’un des comtes mayençais, le même qui, quelques mois auparavant, avait précipité Bradamante dans la caverne. Les soupirs, les sanglots, les gémissements qui faillirent, à cette époque, le rendre aveugle, avaient pour objet la femme qu’il avait maintenant près de lui, et qui était alors retenue prisonnière par le nécromant.

Mais quand le château enchanté du vieil Atlante eut disparu de la colline, et que, grâce au courage de Bradamantc, chacun de ceux qu’il renfermait put aller où il voulait, celle-ci, qui avait toujours été au-devant des désirs de Pinabel, retourna vers lui ; et maintenant elle s’en allait en sa compagnie d’un château à l’autre.

Et, comme elle était méchante et mal élevée, elle ne put se retenir, dès qu’elle vit la vieille qui était avec Marphise, de la poursuivre à mi-voix de railleries et de rires moqueurs. L’altiêre Marphise, qui ne souffrait pas qu’on lui fît impunément outrage, de quelque façon que ce fût, répliqua