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Page:L’Arioste - Roland furieux, trad. Reynard, 1880, volume 2.djvu/225

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ce moment Atlante avait si bien fait, qu’ils n’avaient pu se reconnaître ni l’un ni l’autre.

Roger regarde Bradamante, et Bradamante regarde Roger. Tous deux s’étonnent hautement qu’une illusion ait pu tromper pendant tant de jours leur âme et leurs yeux. Roger serre dans ses bras sa belle dame qui devient plus vermeille que la rose ; puis il cueille sur sa bouche les premières fleurs de ses heureuses amours.

Les deux fortunés amants redoublent mille fois leurs embrassements ; ils se tiennent étroitement serrés, et leur bonheur est si grand, que leur poitrine peut à peine contenir une telle joie. Ils regrettent seulement que les enchantements les aient empêchés de se reconnaître pendant qu’ils erraient sous le même toit et leur aient fait perdre tant d’heureux jours.

Bradamante est disposée à donner à Roger toutes les faveurs qu’une vierge sage peut accorder à son amant, sans que l’honneur en soit atteint. Elle dit à Roger que s’il ne veut pas la voir rester toujours insensible et rebelle à ses derniers désirs, il doit la faire demander pour épouse à son père Aymon ; mais il faut auparavant qu’il reçoive le baptême.

Non seulement Roger est prêt, pour l’amour d’elle, à vivre dans la foi chrétienne, comme autrefois son père, son aïeul et toute sa noble race, mais il donnerait sur-le-champ, pour lui faire plaisir, les jours qui lui restent à vivre : « Ce n’est pas seulement dans l’eau — lui dit-il —