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Page:L’Arioste - Roland furieux, trad. Reynard, 1880, volume 2.djvu/229

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château des comtes de Poitiers, où, il y a à peine trois jours, une coutume honteuse et dure pour les chevaliers et pour les dames, a été imposée par Pinabel, le fils du comte Anselme d’Hauterive et le plus méchant homme qui soit.

« Chaque chevalier, chaque dame qui passent, ne s’en vont pas sans avoir subi l’outrage et la violence. Les uns et les autres doivent mettre pied à terre ; le chevalier doit dépouiller ses armes, et la damoiselle ses vêtements. Il n’y a pas, et il n’y a pas eu depuis de nombreuses années, de meilleurs chevaliers que les quatre qui ont juré de maintenir dans le château la loi imposée par Pinabel.

« Je veux vous raconter à quelle occasion a été faite cette loi qui n’existe que depuis trois jours, et vous verrez la raison, bonne ou mauvaise, qui a contraint les quatre chevaliers à jurer. Pinabel a une dame si méchante et si bestiale, qu’il n’y a pas sa pareille au monde. Allant un jour avec elle, je ne sais où, il fit la rencontre d’un chevalier qui lui fit subir grande honte.

« Le chevalier, ayant été raillé par la maîtresse de Pinabel à propos d’une vieille qu’il portait en croupe, jouta contre Pinabel, qui était doué de peu de vigueur et de trop d’orgueil. Le chevalier lui fit vider les arçons, força sa compagne à descendre de cheval, et pour savoir sans doute si elle marchait droit ou si elle boitait, la laissa à pied, après avoir fait revêtir ses vêtements à la vieille damoiselle.

« Celle qui était restée à pied, pleine de dépit, et