Aller au contenu

Page:L’Arioste - Roland furieux, trad. Reynard, 1880, volume 2.djvu/324

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

niers, elle les a toujours tenus en un lieu secret et sombre. Enfin elle vient de conclure ce traité déloyal et cruel avec celui dont je te parle. Elle doit les livrer demain au Mayençais, sur les confins de ses domaines et de ceux de Bayonne. Bertolas viendra en personne lui payer le prix du plus illustre sang qui soit en France.

« J’en ai immédiatement avisé notre Renaud par un courrier que j’ai fait partir à francs étriers, mais je ne crois pas qu’il puisse arriver à temps, car il a trop de chemin à faire. Je n’ai pas avec moi assez de gens pour tenter une sortie. Mon envie est grande de les secourir, mais je ne puis rien. Cependant une fois que le traître les aura en son pouvoir, il les fera mourir. De sorte que je ne sais que faire et que dire. »


La fâcheuse nouvelle déplut fort à Richardet, et, par cela même, contraria vivement Roger. Les voyant tous deux se taire et ne prendre aucun parti, il leur dit avec feu : « Soyez tranquilles ; je prends sur moi toute cette entreprise. Mon bras ira, à travers mille épées, rendre la liberté à vos frères.

« Je ne veux le concours ni l’aide de personne. Je crois que je suffirai seul à terminer cette affaire. Je vous demande seulement quelqu’un qui me conduise à l’endroit où doit se faire l’échange. Je vous ferai entendre jusqu’ici les cris de ceux qui seront présents à ce honteux marché. » Ainsi il dit, et ce n’était pas chose nouvelle pour un des deux frères, qui avait eu des preuves de sa valeur.