Page:L’Arioste - Roland furieux, trad. Reynard, 1880, volume 3.djvu/218

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nommée, jusque-là si belle, plus noire que de la poix ; quand ils eurent entendu confirmer son dire par plus de dix personnes, ils furent sur le point de tourner leur armes contre eux-mêmes, tellement ils furent saisis de douleur et de rage.

Saisis de honte, furieux, ils se dépouillent de toutes les armes qu’ils ont sur le dos ; ils détachent l’épée qu’ils portent au côté et la jettent dans le fossé. Ils font serment, puisqu’une dame les a vaincus et leur a fait mesurer la terre, qu’ils resteront une année entière sans endosser aucune arme, afin d’expier une si grande faiblesse.

Pendant tout ce temps, ils iront à pied, que la route soit en plaine, qu’elle descende ou qu’elle monte. De plus, l’année expirée, ils ne monteront à cheval, ils ne revêtiront de cotte de mailles ou toute autre armure, que s’ils ont enlevé par force, en un combat, le cheval et les armes d’un chevalier. C’est ainsi que, pour punir leur propre faiblesse, ils s’en vont à pied et sans armes, pendant que leurs compagnons poursuivent leur route à cheval.

Le soir de ce même jour, Bradamante arrive près d’un castel situé sur la route de Paris. Là, elle apprend que Charles et son frère Renaud ont mis Agramant en déroute. Là elle trouve bonne table et bon gîte. Mais cela, comme tout le reste, lui importe peu, car elle mange à peine, elle dort peu, et, loin de songer à se reposer, elle ne pense qu’à changer de lieu.

Mais tout ce que j’ai à vous dire sur elle ne