Page:L’Arioste - Roland furieux, trad. Reynard, 1880, volume 3.djvu/217

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

sans prononcer un mot, car ils ont perdu la parole en même temps que toute hardiesse. Ils semblent stupéfaits d’étonnement, et n’osent plus lever les yeux vers Ullania.

Pendant toute la route, ils s’étaient beaucoup trop vantés auprès d’elle de ce qu’aucun chevalier ni paladin ne pourrait résister au moindre d’entre eux. La dame, pour leur faire encore davantage baisser la tête, et pour les rendre à l’avenir moins arrogants, leur fait savoir que ce n’est point un paladin, mais bien une femme qui les a enlevés de selle.

« Puisqu’une femme vous a si facilement abattus — dit-elle — vous devez penser ce qu’il vous adviendrait de lutter avec Renaud ou Roland, tenus, et pour cause, en si grand honneur. Si l’un d’eux possède jamais l’écu, je vous demande si vous serez contre celui-là de meilleurs champions que vous ne l’avez été contre une dame. Je ne le crois pas, et vous ne le croyez pas non plus vous-mêmes.

« Que cela vous suffise ; il n’est pas besoin d’une preuve plus éclatante de votre valeur, et celui de vous qui, dans sa témérité, voudrait tenter en France une nouvelle expérience, s’exposerait à ajouter un grand dam à la honte dans laquelle il est tombé hier et aujourd’hui ; à moins qu’il n’estime utile.et honorable de mourir de la main de si illustres guerriers. »

Quand Ullania eut bien assuré les chevaliers que c’était une damoiselle qui avait rendu leur re-