Page:L’Arioste - Roland furieux, trad. Reynard, 1880, volume 3.djvu/274

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

chantée a-t-elle touché l’écu, que le Sarrasin est lancé les pieds vers le ciel.

La. magnanime guerrière saisit son destrier et dit : « Je te l’avais bien prédit ; il eût mieux valu remplir la commission dont je te priais, que de montrer tant d’empressement à jouter. Dis au roi, je te prie, qu’il choisisse parmi les siens un chevalier de ma force. Je ne veux pas me fatiguer avec vous autres qui avez si peu d’expérience dans les armes. »

Les spectateurs debout sur les remparts, qui ignorent quel est ce guerrier si solide sur ses arçons, nomment tour à tour les plus fameux d’entre ceux qui leur font si souvent trembler le cœur, même au plus fort de la chaleur. La plupart s’accordent à dire que c’est Renaud. Plusieurs pencheraient pour Roland, s’ils ne savaient pas l’état digne de pitié où. il se trouve.

Le fils de Lanfuse, demandant à tenter la troisième joute, dit : « Je n’espère pas vaincre, mais si je tombe moi aussi, ces guerriers seront plus excusables d’avoir été désarçonnés. » Puis, s’étant prémuni de tout ce dont on a l’habitude de prendre en pareil cas, il choisit, parmi les cent destriers que l’on tenait tout harnachés, celui qui avait le jarret le plus solide et le pas le plus rapide.

Il s’avance pour jouter contre la dame, mais auparavant il lui adresse un salut qu’elle lui rend. Alors elle dit : « S’il m’est permis de le savoir, dites-moi par grâce qui vous êtes. » Ferragus se hâte de la satisfaire, car il faisait rarement diffi-