Page:L’Arioste - Roland furieux, trad. Reynard, 1880, volume 4.djvu/113

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à peine a-t-il prononcé ce vœu, qu’il sent croître ses forces, et qu’il nage d’un bras plus vigoureux.

Sa force croît et son courage renaît. Roger lutte contre les vagues ; il repousse les ondes dont l’une suit l’autre, et qui l’assaillent tour à tour. Tour à tour soulevé ou submergé par elles, il atteint enfin le rivage, au prix de grands efforts ; et il arrive, ruisselant et harassé, au pied d’une colline baignée par la mer.

Tous ses compagnons qui s’étaient confiés à la mer avaient péri dans les flots. Roger, protégé par la bonté divine, put aborder sur cette plage solitaire. Une fois à l’abri des vagues sur la colline inculte et dénudée, une nouvelle crainte naît en sa pensée. Exilé dans un espace si restreint, il tremble d’y mourir de misère.

Mais bientôt son cœur indomptable reprend le dessus, et résolu à supporter tout ce qu’il est écrit dans le ciel qu’il doit souffrir, il porte un pied intrépide à travers les durs rochers, marchant droit à la cime de la montagne. Il n’a pas fait cent pas, qu’il aperçoit un homme courbé par les années et l’abstinence, et dont l’aspect et les vêtements annoncent un ermite. Il lui paraît digne du plus grand respect.

Quand Roger fut prés de lui, l’ermite cria : « Saul, Saul, pourquoi persécutes-tu ma religion ? — C’est ainsi qu’autrefois le seigneur parla à saint Paul en lui portant le coup salutaire. — Tu as cru passer la mer sans payer ton passage, et tu as voulu priver autrui de son gain. Tu vois