Page:L’Arioste - Roland furieux, trad. Reynard, 1880, volume 4.djvu/24

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ayant été assez audacieux pour venir nous voir, je ne sais qui en a averti Marganor ; mais la plupart d’entre eux ont été cruellement punis, et beaucoup ont péri dans les tourments. Depuis, il a établi dans son château la loi la plus détestable qu’on puisse entendre ou qu’on puisse lire.

« Cette loi exige que toute femme qui passe, par hasard ou autrement, par la vallée, soit battue de verges et chassée du pays. Mais auparavant, on la dépouille de ses vêtements, et elle est contrainte à montrer ce que la nature et l’honnêteté nous obligent à cacher. Si quelqu’une y vient, escortée par des chevaliers en armes, elle est mise à mort.

« Celles qui sont escortées par des chevaliers deviennent les victimes de cet impitoyable tyran. Traînées au tombeau de ses deux fils morts, elles y sont immolées de sa propre main. Quant à ceux qui les escortent, ils sont ignominieusement dépouillés de leurs armes et de leurs destriers et plongés en prison. Marganor peut faire tout cela d’autant plus impunément que, nuit et jour, il a plus de mille hommes qui guettent dans tous les alentours.

« Et pour vous dire plus encore, j’ajouterai que s’il en laisse échappe quelques-uns, il leur fait auparavant jurer, sur l’hostie consacrée, d’avoir le sexe féminin en haine toute leur vie. Si donc vous avez envie de perdre ces dames et vous avec, allez visiter ces murs où réside le félon, et vous verrez qu’il a autant de puissance que de cruauté. »