Page:L’Arioste - Roland furieux, trad. Reynard, 1880, volume 4.djvu/27

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Mais auparavant elles jugèrent bon de délivrer la femme que ces sbires conduisaient à la mort. Rendant les rênes à leurs destriers, et les pressant de l’éperon, elles leur firent en un instant franchir la1 courte distance qui les séparait de la troupe armée. Jamais gens ne furent assaillis avec plus d’impétuosité et de vigueur. Aussi s’empressèrent-ils de jeter leurs écus, d’abandonner leurs armes et la vieille, et de s’enfuir sans rien.

De même que le loup qui rentre dans sa tanière chargé de sa proie, et au moment où il se croit le plus en sûreté, voit le chasseur et ses chiens lui barrer le passage, jette son fardeau et se lance au plus épais du fourré, ainsi ces gens, dès qu’ils se virent assaillis, s’empressèrent de prendre la fuite.

Ils n’abandonnèrent pas seulement la vieille et leurs armes, mais ils laissèrent aussi la plupart de leurs chevaux, et coururent se cacher dans les cavernes où ils purent se croire le mieux en sûreté. Roger et les dames en furent enchantés. Ils choisirent trois de ces chevaux, et ils y firent monter les trois dames qui depuis la veille étaient en croupe derrière eux, et faisaient suer leurs destriers.

Puis, débarrassés, ils prirent le chemin qui conduisait vers la demeure de l’infâme et impitoyable châtelain. Ils voulurent que la vieille vînt avec eux pour être témoin de la vengeance de Drusille. Mais la vieille, craignant qu’il ne lui en arrivât mal, ne voulait point y consentir ; elle pleurait, criait, se débattait. Enfin Roger, l’enle-