Page:L’Arioste - Roland furieux, trad. Reynard, 1880, volume 4.djvu/32

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et sans armes, la damoiselle avec laquelle ils étaient venus de rivages si lointains. Je ne sais s’il ne valut pas mieux pour leurs compagnes, qu’ils se trouvassent sans armes. Ils auraient pu, il est vrai, les défendre mieux, mais, s’ils avaient succombé dans la bataille, elles auraient eu un sort pire.

Car elles auraient subi le sort de toutes celles qui arrivaient en ce lieu escortées par des gens armés ; elles auraient été conduites sur le tombeau des deux frères, où on les eût immolées en sacrifice. Il est en somme bien moins dur et bien moins désagréable de montrer ses parties honteuses que de mourir, d’autant plus qu’on a pour excuse d’avoir été contraint à cela et aux autres outrages qui s’ensuivent, par la force et la violence.

Avant de s’éloigner, les guerrières font jurer aux habitants de donner à leurs femmes le gouvernement de leur territoire. Elles menacent de châtier sévèrement ceux qui seraient assez audacieux pour enfreindre ce serment. En somme, elles établissent que dans ce pays les femmes jouiront de tous les droits que les hommes possèdent partout ailleurs.

Puis elles font promettre qu’on refusera l’hospitalité à tous ceux qui passeront par là, cavaliers ou piétons, et qu’on ne leur permettra de se reposer sous aucun toit, à moins qu’ils ne jurent par Dieu et les saints, ou par tout autre serment plus fort s’il en existe toutefois, d’être à tout jamais les amis des dames et les ennemis de leurs ennemis.