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Page:L’Art de séduire les hommes, suivi de L’Amour et les poisons, 1915.djvu/173

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L’ART DE SÉDUIRE LES HOMMES

courant. La femme de chambre, stupéfaite, m’ouvrit et je me trouvai dans la rue. Je me jetai dans un fiacre. J’étais tremblante. Je regardai à plusieurs reprises si le monsieur au lorgnon ne courait pas derrière moi. Il me semblait que tous les passants soupçonnaient, à voir mon visage angoissé derrière les vitres du fiacre, de quel endroit je venais.

« Le soir, mon effroi augmenta encore et je me jugeai perdue. Je m’étais brusquement souvenue de la carte que j’avais fait passer en entrant et qui portait le nom de mon mari. Je me représentai confusément cette carte envoyée au ministre de l’intérieur et mon mari révoqué à cause de l’inconduite de sa femme. Il me fallut quelques jours pour laisser ce cauchemar s’évanouir.

« Que s’était-il passé après mon départ dans la maison de rendez-vous que j’avais si étrangement visitée ? Je ne l’ai jamais su au juste. Mais je reçus à quelques jours de là, dans une enveloppe portant l’en-tête de la Chambre des députés, la fameuse carte dont le souvenir m’avait fait souffrir avec ces mots :

« — Hommage à la vertueuse sous-préfète. »

Depuis ce moment-là, mon amie Gisèle, que cette aventure n’a pas guérie de sa naïveté, a attribué, dans l’ingénuité de son âme, tous les changements