Aller au contenu

Page:L’Art de séduire les hommes, suivi de L’Amour et les poisons, 1915.djvu/249

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

245
L’AMOUR ET LES POISONS

pu apporter à cette sorte de déguisement tout l’effort de son art du costume.

Les rides, les petites rides qu’à la grande lumière on aperçoit près des yeux, disparaissent dans le clair-obscur, sous l’ombre favorable des cheveux défaits. Le peignoir est ouvert, il laisse des bras nus émerger et, près de l’ivoire de la pipe, l’ivoire de la chair n’est pas moins beau, sa teinte rosée ressort mieux.

On est face à face, étendus sur des matelas, séparés seulement par un étroit plateau. On a toute la vaste nuit devant soi. La fabrication des pipes, le travail minutieux que cela impose permet d’interrompre à son gré et de reprendre la conversation, de lui donner le sens qu’il vous plaît.

L’opium enfin, l’opium miraculeux et doux verse lentement l’oubli des choses mélancoliques de la vie, il enseigne l’indulgence et la douceur, il éveille discrètement les sens, il donne une signification de volupté au moindre mouvement des lèvres, au moindre geste d’une main blanche. Il crée entre deux êtres une mystérieuse harmonie, faite d’une compréhension commune de l’amour.

Quand on a fumé ensemble durant une heure, on a une parenté subtile, une parenté imaginative avec celui qui est en face de vous. Les choses qui vous