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Page:L’Auvergne historique, littéraire et artistique, série 3, tome 1, années 1893-1894, 1903.djvu/236

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adieu à l’Amérique après y avoir acclamé le général marquis de La Fayette, son compatriote, dont le nom commençait à voler de bouche en bouche d’un bout à l’autre du Nouveau Monde. De retour au pays natal, il acheta dans le Marais d’Ennezat une propriété assez importante et s’y établit à la fin de 1785.

Riche et par suite considéré, grandi par ses prétendues relations avec le héros de l’Indépendance que Riom venait de députer à l’Assemblée nationale, remuant et agissant à une époque particulièrement agitée, Antoine Persat ne tarda pas à être en relief au sein de la bourgeoisie paysanne de la contrée. On le trouve, en l’an IV, agent municipal des communes réunies d’Entraigues et d’Ennezat, et, dès l’an VI, président de l’administration cantonale.

En signe de concession aux principes d’Égalité et de Fraternité proclamés par la Déclaration des Droits de l’homme, le nouvel évangile politique de la nation, Victor Persat fut tenu sur les fonts baptismaux par un des domestiques de son père. L’enfant grandit sous la double influence atavique que les chefs de famille exercent sur leur descendance. Ses premières années furent bercées des légendes américaines, des drames de la Tour du Temple, des variantes de l’opinion qui tantôt déifiait le général au cheval blanc comme le sauveur de la patrie, tantôt suspectait ses tendances, tantôt enfin le taxait de trahison envers la cause populaire.

La jeunesse de Victor Persat s’écoula sans apporter avec elle de symptômes révélateurs. Cependant, au cours d’un voyage qu’il fit à Bordeaux en 1806 avec ses parents, d’étranges anomalies se produisirent dans sa conduite. On ne s’en effraya pas trop, ces troubles singuliers pouvant être attribués à une poussée de sève, à une crise de puberté.

L’année suivante, Victor, qui avait 17 ans, déclara vouloir embrasser la carrière des armes. On était en pleine épopée impériale. Les camps dépeuplaient les campagnes. Toute la population masculine de la France affluait sur les champs de bataille qui en faisaient une effrayante consommation. Deux de ses frères, Maurice et Pierre, de deux ans et d’un an plus âgés que lui, avaient déjà revêtu l’uniforme du soldat et guerroyaient sous les aigles napoléoniennes.