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Page:La Bruyère - Œuvres complètes, édition 1872, tome 1.djvu/356

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s’ils pouvaient devenir nos ennemis, n’est ni selon la nature de la haine, ni selon les règles de l’amitié ; ce n’est point une maxime morale, mais politique.


56 (V)


On ne doit pas se faire des ennemis de ceux qui, mieux connus, pourraient avoir rang entre nos amis. On doit faire choix d’amis si sûrs et d’une si exacte probité, que venant à cesser de l’être, ils se veuillent pas abuser de notre confiance, ni se faire craindre comme ennemis.


57 (IV)


Il est doux de voir ses amis par goût et par estime ; il est pénible de les cultiver par intérêt ; c’est solliciter.


58 (VII)


Il faut briguer la faveur de ceux à qui l’on veut du bien, plutôt que de ceux de qui l’on espère du bien.


59 (IV)


On ne vole point des mêmes ailes pour sa fortune que l’on fait pour des choses frivoles et de fantaisie. Il y a un sentiment de liberté à suivre ses caprices, et tout au contraire de servitude à courir pour son établissement : il est naturel de le souhaiter beaucoup et d’y travailler peu, de se croire digne de le trouver sans l’avoir cherché.


60 (V)


Celui qui sait attendre le bien qu’il souhaite, ne prend pas le chemin de se désespérer s’il ne lui arrive pas ; et celui au contraire qui désire une chose avec une grande impatience, y met trop du sien pour en être assez récompensé par le succès.


6I (VII)