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Page:La Bruyère - Œuvres complètes, édition 1872, tome 2.djvu/17

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point de palais où il ne s’insinue ; ce n’est pas au milieu d’une chambre qu’il s’arrête : il passe à une embrasure ou au cabinet ; on attend qu’il ait parlé, et longtemps et avec action, pour avoir audience, pour être vu. Il entre dans le secret des familles ; il est de quelque chose dans tout ce qui leur arrive de triste ou d’avantageux ; il prévient, il s’offre, il se fait de fête, il faut l’admettre. Ce n’est pas assez pour remplir son temps ou son ambition, que le soin de dix mille âmes dont il répond à Dieu comme de la sienne propre : il y en a d’un plus haut rang et d’une plus grande distinction dont il ne doit aucun compte, et dont il se charge plus volontiers. Il écoute, il veille sur tout ce qui peut servir de pâture à son esprit d’intrigue, de médiation et de manège. À peine un grand est-il débarqué, qu’il l’empoigne et s’en saisit ; on entend plus tôt dire à Théophile qu’il le gouverne, qu’on n’a pu soupçonner qu’il pensait à le gouverner.

I6 (I)

Une froideur ou une incivilité qui vient de ceux qui sont au-dessus de nous nous les fait haïr, mais un salut ou un sourire nous les réconcilie.

I7 (VI)

Il y a des hommes superbes, que l’élévation de leurs rivaux humilie et apprivoise ; ils en viennent,