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Page:La Bruyère - Œuvres complètes, édition 1872, tome 2.djvu/180

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Ceux qui, ni guerriers ni courtisans, vont à la guerre et suivent la cour, qui ne font pas un siège, mais qui y assistent, ont bientôt épuisé leur curiosité sur une place de guerre, quelque surprenante qu’elle soit, sur la tranchée, sur l’effet des bombes et du canon, sur les coups de main, comme sur l’ordre et le succès d’une attaque qu’ils entrevoient. La résistance continue, les pluies surviennent, les fatigues croissent, on plonge dans la fange, on a à combattre les saisons et l’ennemi, on peut être forcé dans ses lignes et enfermé entre une ville et une armée : quelles extrémités ! On perd courage, on murmure. « Est-ce un si grand inconvénient que de lever un siège ? Le salut de l’État dépend-il d’une citadelle de plus ou de moins ? Ne faut-il pas, ajoutent-ils, fléchir sous les ordres du Ciel, qui semble se déclarer contre nous, et remettre la partie à un autre temps ? » Alors ils ne comprennent plus la fermeté, et s’ils osaient dire, l’opiniâtreté du général, qui se raidit contre les obstacles, qui s’anime par la difficulté de l’entreprise, qui veille la nuit et s’expose