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Page:La Bruyère - Œuvres complètes, édition 1872, tome 2.djvu/181

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le jour pour la conduire à sa fin. A-t-on capitulé, ces hommes si découragés relèvent l’importance de cette conquête, en prédisent les suites, exagèrent la nécessité qu’il y avait de la faire, le péril et la honte qui suivaient de s’en désister, prouvent que l’armée qui nous couvrait des ennemis était invincible. Ils reviennent avec la cour, passent par les villes et les bourgades ; fiers d’être regardés de la bourgeoisie qui est aux fenêtres, comme ceux mêmes qui ont pris la place, ils en triomphent par les chemins, ils se croient braves. Revenus chez eux, ils vous étourdissent de flancs, de redans, de ravelins, de fausse-braie, de courtines et de chemin couvert ; ils rendent compte des endroits où l’envie de voir les a portés, et où il ne laissait pas d’y avoir du péril, des hasards qu’ils ont courus à leur retour d’être pris ou tués par l’ennemi : ils taisent seulement qu’ils ont eu peur.

I00 (IV)

C’est le plus petit inconvénient du monde que de demeurer court dans un sermon ou dans une harangue : il laisse à l’orateur ce qu’il a d’esprit, de bon sens, d’imagination, de mœurs et de doctrine ; il ne lui ôte rien ; mais on ne laisse pas de s’étonner que les hommes, ayant voulu une fois y attacher une espèce de honte et de ridicule, s’exposent par de longs et souvent d’inutiles discours, à en courir tout le risque.

I0I (IV)

Ceux qui emploient mal leur temps sont les