Page:La Bruyère - Œuvres complètes, édition 1872, tome 2.djvu/28

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Se louer de quelqu’un, se louer d’un grand », phrase délicate dans son origine, et qui signifie sans doute se louer soi-même, en disant d’un grand tout le bien qu’il nous a fait, ou qu’il n’a pas songé à nous faire.

(IV) On loue les grands pour marquer qu’on les voit de près, rarement par estime ou par gratitude. On ne connaît pas souvent ceux que l’on loue ; la vanité ou la légèreté l’emportent quelquefois sur le ressentiment : on est mal content d’eux et on les loue.

38 (IV)

S’il est périlleux de tremper dans une affaire suspecte, il l’est encore davantage de s’y trouver complice d’un grand : il s’en tire, et vous laisse payer doublement, pour lui et pour vous.

39 (V)

Le prince n’a point assez de toute sa fortune pour payer une basse complaisance, si l’on en juge par tout ce que celui qu’il veut récompenser y a mis du sien ; et il n’a pas trop de toute sa puissance pour le punir, s’il mesure sa vengeance au tort qu’il en a reçu.

40 (IV)

La noblesse expose sa vie pour le salut de l’Etat et pour la gloire du souverain ; le magistrat décharge le prince d’une partie du soin de juger les peuples : voilà de part et d’autre des fonctions bien sublimes et d’une merveilleuse utilité ; les hommes ne sont guère capables de plus grandes choses, et je ne sais d’où la robe et l’épée ont puisé de quoi se mépriser réciproquement.

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(IV)