Page:La Bruyere - Caracteres ed 1696.djvu/112

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en un moment toute la fraîcheur de leur teint, qu’elles euſſent le viſage auſſi allumé & auſſi plombé qu’elles ſe le font par le rouge & par la peinture dont elles ſe fardent, elles ſeraient inconſolables.

7. — Une femme coquette ne ſe rend point ſur la paſſion de plaire, & ſur l’opinion qu’elle a de ſa beauté : elle regarde le temps & les années comme quelque choſe ſeulement qui ride & qui enlaidit les autres femmes ; elle oublie du moins que l’age eſt écrit ſur le viſage. La meſme parure qui a autrefois embelli ſa jeuneſſe, défigure enfin ſa perſonne éclaire les défauts de ſa vieilleſſe. La mignardiſe & l’affectation l’accompagnent dans la douleur & dans la fièvre : elle meurt parée & en rubans de couleur.

8. — Liſe entend dire d’une autre coquette qu’elle ſe moque de ſe piquer de jeuneſſe, & de vouloir uſer d’ajuſtements qui ne conviennent plus à une femme de quarante ans. Liſe les a accomplis ; mais les années pour elle ont moins de douze mois, & ne la vieilliſſent point : elle le croit ainſi, & pendant qu’elle ſe regarde au miroir, qu’elle met du rouge ſur ſon viſage & qu’elle place des mouches, elle convient qu’il n’eſt pas permis à un certain age de faire la jeune, & que Clarice en effet, avec ſes mouches & ſon rouge, eſt ridicule.

9. — Les femmes ſe préparent pour leurs amants, ſi elles les attendent, mais ſi elles en ſont ſurpriſes, elles oublient à leur arrivée l’état où elles ſe trouvent ; elles ne ſe voient plus. Elles ont plus de loiſir avec les indifférents, elles ſentent le déſordre où elles ſont, s’ajuſtent en leur préſence, ou diſparaiſſent un moment, & reviennent parées.

10. — Un beau viſage eſt le plus beau de tous les ſpectacles ; & l’harmonie