Page:La Bruyere - Caracteres ed 1696.djvu/177

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

leurs terres les mieux titrées avec leurs chateaux & leurs maiſons antiques, poſſédées par des gens dont les pères étaient peut-eſtre leurs métayers, quelle opinion pourraient-ils avoir de noſtre ſiècle ?

24. — Rien ne foit mieux comprendre le peu de choſe que Dieu croit donner aux hommes, en leur abandonnant les richeſſes, l’argent, les grands établiſſements & les autres biens, que la diſpenſation qu’il en fait, & le genre d’hommes qui en ſont le mieux pourvus.

25. — Si vous entrez dans les cuiſines, où l’on voit réduit en art & en méthode le ſecret de flatter votre goût & de vous faire manger au delà du néceſſaire ſi vous examinez en détail tous les appreſts des viandes qui doivent compoſer le feſtin que l’on vous prépare ſi vous regardez par quelles mains elles paſſent, & toutes les formes différentes qu’elles prennent avant de devenir un mets exquis, & d’arriver à cette propreté & à cette élégance qui charment vos yeux vous font héſiter ſur le choix, & prendre le parti d’eſſayer de tout ; ſi vous voyez tout le repas ailleurs que ſur une table bien ſervie, quelles ſaletez ! quel dégoût ! Si vous allez derrière un théatre & ſi vous nombrez les poids les roues, les cordages qui font les vols & les machines ; ſi vous conſidérez combien de gens entrent dans l’exécution de ces mouvemens, quelle force de bras, & quelle extenſion de nerfs ils y emploient, vous direz : « Sont-ce là les principes & les reſſorts de ce ſpectacle ſi beau, ſi naturel, qui paraît animé & agir de ſoy-meſme ? » Vous vous récrierez : « Quels efforts ! quelle violence ! » De meſme n’approfondiſſez pas la fortune des partiſans.

26. —