Page:La Bulgarie au lendemain d'une crise, 1895.djvu/32

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une députation pour lui offrir la couronne princière. Il le conserva comme président du conseil, et pendant sept années, il lui voua une reconnaissance fidèle, qui ne se démentit pas, même lorsque ce conseiller indigne osa s’en servir au détriment de la Bulgarie. Le Prince ne s’est séparé de Stambouloff qu’à contre-cœur ; il a fallu pour cela qu’il se vît en face de cette alternative : ou se mettre en contradiction formelle avec les désirs de son peuple et compromettre des résultats péniblement acquis, ou mettre fin au despotisme terroriste d’un ministre dont l’impopularité menaçait de rejaillir sur le trône.

Spectacle étrange et saisissant ! Le jeune Prince — nature fine, aristocratique, doué de tous les attraits d’une éducation raffinée, pénétré de l’importance de la mission qu’il doit remplir — marche, plein de confiance, à côté de son conseiller plébéien, issu des dernières couches sociales, et dont la physionomie à demi orientale trahit la violence brutale, la soif intense de la domination, jointes à la fourberie la plus atroce. Longtemps ils font route ensemble. Mais le premier grandit dans l’accomplissement de ses devoirs princiers, l’autre dans les passions de son naturel sans frein. Il faut présenter ce tableau avec ses lumières et ses