Page:La Chanson de la croisade contre les Albigeois, 1875, tome 2.djvu/119

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introduction, § xii.

J’ai déjà cité estot, faux imparfait du verbe estre, dans la rime en ot ; je pourrais citer paianor, 361, qui à la vérité est provençal, mais ne peut s’employer comme ici (la paianor au sens de « la terre payenne »), ce mot, dans tous les exemples que j’en connais, étant construit comme un génitif pluriel, qu’il est en effet. De même encore companhor, 352, qui paraît être un pur barbarisme, amené par la rime, et tant d’autres que je ne puis mentionner faute de place. Guillem de Tudèle est pour la langue comme pour les idées un écrivain bâtard qui se tient à mi-chemin entre le parti croisé ou français et celui de Toulouse, et ne peut qu’être désavoué par l’un et par l’autre.

XII. L’auteur anonyme de la seconde partie : versification et langue.

1. Versification.

Laisses. — La seconde partie du poème est beaucoup plus considérable que la première, puisqu’elle comprend 6810 vers (du vers 2769 au vers 9578). Néanmoins elle n’a que 83 laisses, tandis que G. de Tudèle nous en offre 131. La moyenne des vers est donc pour le second auteur de 82 vers par laisse. Remarquons qu’au début, le poète, influencé peut-être par l’exemple de G. de Tudèle, fait ses laisses relativement courtes, quoique déjà plus longues que celles de son devancier[1]. Les 26 premières ont en tout 1213 vers

  1. S’il était sûr que l’auteur anonyme se fût appliqué dans le commencement à ne pas trop dépasser la longueur des tirades de la première partie, ce serait une preuve qu’il aurait eu sous les yeux le poème inachevé de Guillem de Tudèle et qu’il se serait proposé de le continuer. Telle est l’opinion que je considère comme la plus probable ; toutefois je ne voudrais pas trop insister sur l’argument tiré de la longueur des laisses.